L’arbre aux corps
Le mouvement, le corps, les troncs de certains arbres, la peinture, la toile, le papier, l’énergie, la matière, le multiple et l’unité, c’est dans un désordre que les choses se sont embrassées.
Le corps a souhaité quitter sa condition d’appendice de vie et regagner son entièreté, son unité, sa capacité d’écoute totale, du bout des poils au bout des pieds et dans toutes ses couches identifiables et insoupçonnables. C’est ce corps en quête d’expérience qui a rencontré le corps de ces vieux oliviers dans les Pouilles et qui depuis gravite autour de l’arbre et en lui, face à la toile, loin de lui.
L’arbre est le sujet d’une exploration plastique des corps.
La peinture s’installe rapidement comme terrain d’un jeu à quatre outils, couleur, toile, pinceau puis spatule, et corps, ce dernier manipulé par ce contact avec l’arbre.
Une première série de peintures, Les Primaires, est marquée par le théâtre des corps et des couleurs.
Un autre théâtre s’ouvre avec D-Frag, où les peintures sont à la fois l’arène et les interlocuteurs des musiciens, comédiens, danseurs, dans une pièce qui s’écrit directement avec le public.
Progressivement, la peinture mue, la scène de son théâtre se vide, les couleurs quittent la place du décor pour se serrer sur les corps, laissant la toile de fond brute, résonante de sa nudité. Chaque peinture devient l’occasion pour le couple couleur/toile, de vérifier la source revitalisante de chacun. De ces scènes de ménages naissent les peintures de la série Les Brutes, où la toile nue repousse la couleur dans ses derniers retranchements, la structure vitale de la forme.
L’arbre se dédouble.
Le sujet, l’image corporelle de l’arbre, crache devant lui en petits morceaux sa matière brulée. Au charbon! Le fusain chasse huile et toile pour délivrer l’empreinte de l’image corporelle de l’arbre, noire sur blanc papier. Le travail du fusain donne naissance à la série Descendre, une douzaine de dessins sur papier.
Comme avec la toile, le corps est pris dans le jeu du couple fusain/papier, à vérifier la source revitalisante de chacun, avec une issue formellement différente. L’image corporelle de l’arbre n’est plus présente qu’au travers de sa matière brulée. Avec Craft s’ouvre un champ où le sujet est la rencontre entre les outils corps, fusain/craie/encre et papier.
La présence de la matière bois ne se manifeste pas qu’au travers du bois cuit. Sous la forme de copeaux plus ou moins gros, le bois cru, avec le métal et la soie, donne naissance à l’Installation Tree-cycle.
L’arbre se démultiplie.
Il devient sujet et matière d’une installation mobile onirique, bulle de milieu naturel surgie dans la cité, lieu de rétablissement d’un lien avec les sources revitalisantes d’énergie et d’apaisement, avec le précieux temps lent et vivace du végétal. L’arbre aimé se fait aimant, rendant incontournable le contact intime avec son être tant matériel qu’immatériel.
C’est un petit pas sur une voie de connaissance qui laisse entendre un univers d’une incommensurable fertilité.